Lombalgie et anxiété : mécanismes et conséquences


Mécanismes de l’anxiété Comportements de l’anxiété Manifestations de l’anxiété

Mécanismes de l’anxiété

Définition

L’anxiété est une émotion (comme la peur, la joie, la colère..), une sensation normale, une énergie qui permet de s’adapter aux situations nouvelles d’apparences menaçantes, incertaines ou incontrôlables. L’anxiété permet de se protéger des dangers extérieurs. Elle donne force, énergie et endurance pour fuir ou surmonter les défis.

Adaptée ou non ?

Dans le cas de la douleur, l’anxiété est adaptée lorsqu’elle est brève et unique, et s’applique à un contexte dangereux ou nécessitant un effort particulier.
Par exemple : la peur de se faire mal en soulevant une charge lourde amène à se concentrer sur l’effort pour le réussir ou à renoncer à un effort peu utile et dangereux.

L’anxiété devient inadaptée lorsque :

  • La lombalgie persiste sur plusieurs semaines ou mois,
  • La douleur, intense, apparaît de façon inattendue.

Anxiété adapatée ou inadaptée

Impact évolution de la lombalgie

L’anxiété va venir, ici, amplifier le vécu douloureux. La douleur aiguë, vécue violemment, peut constituer une expérience effrayante et le fait de redouter cette douleur peut amener la personne à éviter absolument cette douleur.

L’évitement associé à la peur de la douleur devient une habitude et a pour conséquence une réduction progressive des activités et un risque croissant d’atrophie musculaire. Ceci peut expliquer le développement de la douleur chronique à partir d’une douleur aiguë mais passagère.

L’anxiété s’installe au fur et à mesure que le syndrome douloureux se pérennise.

Schéma évolution lombalgie

Comportements de l’anxiété

Principes

L’anxiété provoque le développement de trois types de comportements :

  • évitement et hypervigilance
  • absence de projection dans le futur
  • focalisation sur le vécu quotidien de la douleur

3 types de comportements

Hypervigilance

L’anxiété provoque le développement de l’hypervigilance : le patient guette d’éventuels signes de douleur avec une attention exacerbée (il « attend » sa douleur).

Cette hypervigilance a comme conséquence :

  • une exagération de la perception de la douleur (détectée plus précocement et à des seuils plus faibles),
  • une augmentation de l’impact de la douleur sur les comportements.

L’hypervigilance s’entretient d’elle-même : plus la peur est forte, plus la douleur est perçue comme importante et plus la peur d’une douleur ultérieure devient forte.

L’hypervigilance favorise le passage de la lombalgie aiguë (un épisode isolé de quelques jours) à la lombalgie chronique (continue sur des mois voire des années).

Pour mieux comprendre l’hypervigilance, on peut prendre l’exemple du robinet qui goutte la nuit. En vigilance normale, on n’y prête pas attention et l’on se s’endort. En hypervigilance, on concentre son attention sur ce bruit de robinet qui goutte qui devient quasiment obsessionnel et empêche de s’endormir.

SCHÉMA : Anxiété à la douleur => Focalisation de l’attention sur la douleur => Hyper-perception de la douleur => Augmentation de l’impact =>

Évitement

L’évitement consiste à renoncer à toute action pour laquelle on anticipe ou l’on craint une éventuelle douleur.

Ce phénomène, normal mais raisonnable chez toute personne, devient exagéré en cas d’anxiété associée à la lombalgie. Le patient renonce progressivement à un grand nombre d’activités de sa vie courante, y compris des activités fondamentales comme le fait de travailler, d’avoir une vie affective, de pratiquer une activité physique, de se déplacer…

De plus, tout mouvement, avant d’être effectué, est d’abord évalué en terme de « cela va-t-il faire mal ? ». Le patient perd sa spontanéité, son aptitude au changement.

Au final, le patient se réfugie progressivement dans un repli sur soi avec activité faible et répétitive.

Absence projection dans le futur

L’anxiété, alliée à la lombalgie, empêche de se projeter dans le futur.

Tout mouvement est vécu comme un risque d’aggravation de sa douleur, et augmente l’anxiété. Le futur lui-même est perçu comme une probable aggravation de la douleur.

Le patient anxieux se replie sur lui-même et s’éloigne des autres. La douleur le retranche de ses activités, y compris de celles qu’il aimait. Le patient anxieux perd confiance en lui et de ce fait il perd confiance dans le monde. La douleur crée une distance puisqu’elle l’immerge dans un univers inaccessible à tout autre.

Cette anxiété rend illusoire toute notion d’échappement à la douleur, de contrôle de son futur (et donc de guérison)…

Le patient anxieux se replie sur lui-même et s'éloigne des autres

Focalisation sur le vécu quotidien

Le patient lombalgique anxieux porte son attention exclusivement sur les signes de cette douleur. La douleur devient envahissante, omniprésente. Ceci crée une confusion, une désorientation et des difficultés à se concentrer. L’équilibre de vie est ébranlé.

Le patient lombalgique anxieux est dans l’impossibilité de s’opposer à l’envahissement des pensées répétitives centrées sur la douleur. Il est sujet en permanence à des ruminations par rapport à ses douleurs, à son incapacité à sortir de cet engrenage.

« Ma douleur persiste c’est signe que c’est grave. Je vais finir paralysé »

Manifestations de l’anxiété

Principes

L’anxiété se manifeste principalement de trois façons :

  • physiologique,
  • comportementale,
  • subjective.

Manifestation physiologique

Les manifestations physiologiques de l’anxiété peuvent être visibles ou non : sueur, pâleur, paumes des mains moites, tachycardie, souffle coupé, sentiment de tension, d’appréhension, de nervosité, d’inquiétude, d’irritabilité…

Manifestation comportementale

Le patient lombalgique connaît plusieurs situations qui sont sources de douleur. Face à une douleur, le réflexe normal est de tout faire pour les faire cesser. La conduite la plus simple est d’arrêter la situation, le comportement responsable de la douleur. C’est ce qu’on appelle l’évitement « quand je ne bouge pas, je n’ai pas mal, et je ne risque rien ».

Evitement
Exemple d’évitement à la position assise source de douleur

L’anxiété amène à redouter également des situations, comportements, actions dans lesquelles il ne court aucun danger réel.

L’anxiété amène donc à la « peur du mouvement », ou kinésiophobie. Elle est associée à un évitement de toute activité physique pouvant engendrer une atteinte physique.

Le patient lombalgique se sent vulnérable, son intolérance à l’incertitude face à la douleur, la façon dont il perçoit les situations sollicitant ainsi sa capacité d’adaptation, l’épuisent physiquement et psychologiquement.

Réponse subjective

Notre mémoire à long terme renferme des systèmes de croyances façonnés par nos apprentissages et nos expériences. Ce système de croyances détermine une vision personnelle du monde, des autres et de soi.

Quand un événement survient, comme une douleur intense nous l’évaluons et la confrontons à notre système de croyance.

L’anxiété est une émotion provoquées par des pensées. Si les pensées sont positives par rapport à la douleur alors l’anxiété associée sera adaptée «j’ai mal mais je sais que ce n’est pas grave, il faut que je fractionne mon activité afin de ne pas augmenter ma douleur. »

Si les pensées sont catastrophistes alors l’anxiété sera inadaptée « j’ai mal, ça doit être grave, il faut que je reste alité pour ne pas augmenter ma douleur ».

Autre exemple :
Faire le lien entre le mal de dos et une maladie grave « si la douleur persiste c’est que c’est grave », à une activité physique ou professionnelle qui risque d’ être fatale.

Anxiété adaptée ou pas adaptée